Si tout change...
Pékin, le 21 novembre 2006
Si tout change, il y a pourtant des choses qui ne changeront jamais.
La traversée depuis l'aéroport jusqu'à Chaoyang suffit à me rassurer. Malgré le paysage urbain saturé de tours qui semblent émerger d'une continuelle litanie de coups de marteaux et de grincements de scies, d'un cauchemar poussiéreux d'échafaudages et d'étincelles métalliques, de l'effervescence suante d'une fourmilière d'ouvriers, le rythme lent des sanlunche (三輪車, tricycles pousse-pousse pour le transport de marchandises) croulant sous des piles de morceaux de charbon cylindriques continue sa triste complainte de pédales mal huilées dans les allées en bordure des périphériques embouteillés. La splendeur rêvée d'une nouvelle ville ultramoderne s'affadit sous la nappe de smog et Pékin reste la ville triste, sage, constante, sérieuse qu'elle a toujours été, avec son plan quadrillé et ce côté rangé qui la distinguent des villes du sud. Malgré les changements spectaculaires, l'incroyable métamorphose d'une Chine commerciale et consommatrice dont on nous rebat les oreilles pour mieux vendre l'utopie, il suffit d'observer attentivement pour voir transparaître la Chine des laobaixing (老百姓, les gens ordinaires) au détour d'une ruelle, d'un couloir de métro ou d'un centre commercial.